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Interview de Mathilde L’Azou (1/2) : un véritable couteau suisse

by Gaspard Langrand

Bien que ce soit l’une des photographe d’équipe les plus connues du peloton, Mathilde L’Azou occupe différents postes au fil de l’année. Elle nous parle de ses métiers dans cette première partie. 


Le métier de photographe d’équipe

Cycling Times : Bonjour Mathilde, peux-tu te présenter ?

Mathilde L’Azou : Je m’appelle Mathilde l’Azou. J’ai 27 ans et je fais plusieurs métiers dans le monde du sport. J’ai commencé en tant que journaliste pour France TV Sport, où j’ai pu faire les Jeux Olympiques de Rio, plusieurs Roland Garros, Six Nations, le Tour, …  Depuis j’ai ajouté d’autres cordes à mon arc puisque je suis photographe, community manager et je peux aussi être attachée de presse. Essentiellement dans le vélo avec la Team Cofidis ou France 3 Bretagne ou d’autres organisations, mais aussi un petit peu dans le monde de l’athlétisme. Donc tu l’auras compris, je reste beaucoup dans le monde du sport. Je fais aussi des mariages de temps en temps en tant que photographe. Mais mon but c’est vraiment d’être à la rencontre des gens. Et les aider à avoir des souvenirs par n’importe quel moyen. Que ce soit, en témoignant. Que ce soit dans des photos. Ou en étant là pour les aider du mieux possible.

C.T. : Comment es-tu arrivée au poste que tu occupes actuellement, c’est-à-dire chez Cofidis ? Ou même à France TV ? 

M.L : Tout a commencé quand j’étais toute petite. J’avais 14 ans quand j’ai fait mon premier Tour de France en tant que journaliste. C’était grâce aux “Jeunes reporters”. C’était en 2010. Et grâce à ça, j’ai commencé à travailler pour un site, d’abord bénévolement, qui s’appelait Vélo 101. Puis j’ai intégré une école de journalisme dès que j’ai eu mon bac à l’âge de 16 ans. Après ça, j’ai fini mes études très tôt. Du coup, à 19 ans, j’avais ma licence en poche et j’en avais marre des études. France TV, avec qui j’avais fait mon stage de fin d’année m’a dit : “Tu veux pas venir sur le Tour ?”. Et c’est parti comme ça et en 2015, j’ai fait mon 2e Tour de France. Et après tout s’est enchaîné très très très très vite. Et en fait, Cofidis, je suis rentrée dans l’équipe parce qu’à la base, je faisais des reportages pour France TV Sport. Tout au long de l’année, on les suivait pour une web-série et je m’en occupais et j’avais mon appareil photo car on me demandait de faire des photos aussi à côté pour illustrer un petit peu le site. Ils ont remarqué mes photos et c’est parti comme ça. 

C.T. : Qu’est ce qui change entre un photographe dit “plus classique” et photographe d’une équipe ? 

M.L : Photographe d’équipe : faut se concentrer sur l’équipe que tu shootes. C’est vrai que, par exemple, sur le Tour de France, il y a des endroits que j’adorerais photographier parce que c’est magnifique. Le cadre est incroyable, les spectateurs aussi. Mais mon premier rôle, moi, c’est de mettre en avant les coureurs de mon équipe et les sponsors de cette équipe-là. Donc je dois vraiment miser, par exemple, sur une étape de montagne, j’aimerais bien pouvoir me mettre dans un col mythique et shooter. Sauf qu’en fait ils vont être encore en peloton ou en gros groupe et du coup je vais pas forcément les avoir comme je veux. Alors que, par exemple, dans le Puy-de-Dôme, j’étais toute seule à 800 mètres de l’arrivée. Il n’y avait personne et j’ai pu les avoir un à un. Donc voilà faut vraiment que je réfléchisse toujours à comment bien mettre en valeur l’équipe. Donc c’est complètement une autre stratégie, une autre approche que quand par exemple, oui, je suis sur la moto et où là je dois vraiment seulement me concentrer sur l’aspect “joli” des photos que je peux donner.

C.T. : Ton rôle, en fait, c’est de mettre en avant la marque.

M.L : Exactement. Et puis de mettre en avant les sportifs. Forcément ! Ils ont tous des histoires très sympas à raconter – parce que je suis aussi Community Manager de temps en temps pour l’équipe, notamment quand je suis sur le terrain. Donc, c’est moi aussi qui choisit comment je mets en avant mes photos et qui. Comment est-ce qu’on peut raconter une histoire qui peut plaire évidemment aux gens qui suivent l’équipe, mais aussi toucher le grand public.

C.T. : Je reviens sur le côté photographe de Cofidis, est-ce que tu veux faire ça toute ta vie ? Enfin jusqu’à la retraite ?

M.L : Non, non, non. Je pense qu’un jour j’aurais envie de me calmer. Et pas de passer toute ma vie à vivre avec une valise (rires). Mais pour l’instant, je suis jeune. j’estime avoir de la chance de faire ce que je fais. Mais après je sais que le jour où j’en aurais un peu marre, où je me sentirais un peu blasé de partir sur le Tour de France, sur Roubaix. Là, il faudra se poser les bonnes questions. Et je suis pas trop du genre, moi, à vouloir rester sur mes lauriers. Donc je suis plutôt du genre à vouloir tester de nouvelles aventures, à apprendre, à toujours évoluer. Pour l’instant, je pense que mon chemin n’est pas n’est pas terminé côté photo, côté Cofidis. Après qui sait ce qui se passera ensuite ? On sait jamais de quoi est fait le lendemain. 

C.T. : Est-ce que tu peux nous donner les avantages et les contraintes du métier ? 

M.L : Les avantages c’est que, quand tu es passionné de vélo ou de sport, pouvoir être comme ça, tous les jours, au quotidien, au contact de sportifs que l’on a l’habitude de voir à la télévision, c’est une chance. C’est un privilège. Il faut aussi savoir ne pas trop en abuser. Parce que je ne suis pas là pour les déranger toutes les 5 secondes pour une photo, une vidéo. J’essaie vraiment de les protéger et de les laisser dans leur bulle au maximum. Même si on rigole quand même pas mal ! 

Et après, les inconvénients, je dirais, qu’on n’a pas les mêmes accès que les photographes officiels ou les journalistes à certains moments. Donc il faut savoir  jouer des coudes, notamment sur les les arrivées de de Grands Tours ou les grands événements, mais on s’adapte.

« c’est incroyable […] de pouvoir raconter ce que l’on sait »

C.T. : Tu as commenté le Grand Prix du Morbihan féminin avec Marion Hérault-Garnier. Qu’est-ce que ça représente pour toi ? C’était un rêve ? Une ambition ? Une volonté ?

M.L : Pour moi, pour nous, ça a représenté beaucoup de pouvoir être deux femmes à commenter. On a aussi commenté les hommes l’après-midi. C’était une première et c’est terrible qu’il faille attendre 2023 pour que ça en soit une. En sachant qu’en plus Marion, c’est une amie. On s’entend très bien et on se soutient mutuellement dans nos carrières. On est à peu près pareil niveau caractère. Forcément, c’était un moment incroyable et je pense qu’on s’est très bien entendu tout de suite. Comme hors antenne en fait. Et c’est cool ! J’espère que ça va pouvoir se refaire parce que c’est toujours un bonheur. 

En fait, l’idée c’est qu’à un moment donné, il va falloir qu’on arrête de se dire “Elle commente une course femmes, parce que c’est une femme” et “Wow elle commente une course homme parce que c’est une femme”. Il faut juste prendre par rapport aux compétences et par rapport au suivi de la course. Quand tu vois, par exemple, Marion Rousse sur France TV nationale, elle reconnaît tous les coureurs, elle connaît toutes les tactiques de course et on a arrêté de dire “Elle est là parce que elle fait le nombre”, parce que c’est femme. Mais parce qu’elle est ultra compétente

C.T. : Tu te verrais en faire plus souvent ? Voir en faire ton activité principale ?

M.L : C’est une très bonne question. C’est vrai que, si j’avais l’opportunité de le faire plus souvent, je pense que je foncerai. Parce que c’est incroyable d’être au cœur de la course, de pouvoir raconter ce que l’on sait, ce qu’on voit, ce qu’on devine, ce qui apparaît en tactique de course ou en attaque, ou en sensation. Après, pour l’instant, je me dis que je suis encore jeune. Donc peut-être qu’un jour les portes s’ouvriront. Mais en attendant, à moi de travailler, à moi, de savoir ouvrir les portes quand elles se présentent et de rester sérieuse, focus sur mon travail et de continuer à développer mes autres activités à côté.


Merci à Mathilde pour l’interview. La partie 2 est déjà disponible juste ici, Mathilde évoque notamment ses nombreux engagements !

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