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Remco Evenepoel, 44 ans après…

by Maxime Seveno

En 1978, le Belge Johan de Munynck remportait le Tour d’Italie. Cet exploit était jusqu’au 11 Septembre 2022 la dernière victoire d’un Belge sur un Grand Tour. Cela faisait donc 44 ans que la Belgique attendait un vainqueur de grand Tour. Ce jour est enfin arrivé.

En effet, ce dimanche soir, Remco Evenepoel a mis fin à cette disette qui touchait l’orgueil d’une des plus grandes nations de l’histoire du cyclisme. Le natif de Schepdael devient le vainqueur du 77ème Tour d’Espagne. Pendant ces trois semaines, il a dominé ses concurrents, au point de s’imposer avec 2 minutes et 1 seconde d’avance sur son ancien coéquipier Enric Mas de l’équipe Movistar, et 4 minutes et 57 secondes sur Juan Ayuso.

Une performance sensationnelle pour ce jeune homme de 22 ans, né pour dominer, mais qui a affronté des épreuves difficiles dans sa carrière.

Un talent générationnel.

En Avril 2017, Remco Evenepoel décide de suivre les traces de son père, Patrick, qui était coureur professionnel dans les années 90. Il était alors un espoir du football, ancien capitaine des Diables Rouges U16. Mais son manque d’explosivité et de technique l’empêche de rêver d’une carrière professionnelle dans le ballon rond, en dépit d’une endurance exceptionnelle.

Au début, malgré quelques chute au sein du peloton, en raison de son inexpérience et son manque de technique, le Belge s’adapte très vite et montre un potentiel époustouflant. L’année suivante, le Brabançon réalise la meilleure année qu’un junior puisse réaliser. Il réalise le doublé route + contre-la-montre sur les championnats de Belgique, d’Europe, et mondiaux confondus !

Une domination exceptionnelle qui est notamment caractérisée par sa victoire lors des Championnats d’Europe de course en ligne. Sorti dès le premier tour de circuit, il s’impose avec 9 minutes et 44 secondes sur Alexandre Balmer, son dauphin ce jour-là. Du jamais-vu. L’année suivante, dès sa première année professionnelle, il remporte la Clasica San Sebastian et devient champion d’Europe et vice champion du monde du chrono, le tout en étant âgé de seulement 19 ans.

Remco Evenepoel, célébrant son doublé durant les championnats du monde juniors en 2018 / @gettyimages.

Bref, Remco Evenepoel est un talent générationnel, un phénomène de précocité rarement vu dans ce sport.

Un combattant bravant les épreuves difficiles d’une carrière.

La carrière de Remco Evenepoel a été loin d’être un long fleuve tranquille. Si d’autres prodiges comme le Slovène Tadej Pogačar ont d’ores et déjà connu la gloire et les plus grands succès, cela n’a pas été le cas du Belge.

Le 15 août 2020, alors qu’il réalisait jusque-là une saison impressionnante, Remco tombe dans la descente du Sormano, durant son premier Tour de Lombardie. Une chute spectaculaire où il a dû attendre une année avant de retrouver les pleines possessions de ses moyens.

Malgré la chute du Tour de Lombardie, le Belge est revenu à son meilleur niveau / AFP

Durant cette année de transition qu’a été 2021, il a multiplié les déceptions dans les grands rendez-vous : 2ème semaine du Giro, des Jeux Olympiques décevants. à la fin de l’année, il devient vice-champion d’Europe, n’arrivant pas à lâcher Colbrelli durant la dernière ascension du parcours, et remporte une médaille de bronze dans les championnats d’Europe et du monde du chrono.

A cette époque, Remco Evenepoel a été beaucoup attaqué par la presse flamande et les réseaux sociaux : faible mentalement, enfant gâté et arrogant multipliant les frasques, et incapable d’être un coéquipier modèle, si on croit les paroles d’Eddy Merckx :

« Si il n’y aurait qu’un seul leader, vous ne devez pas sélectionner Evenepoel avec vous. Il ne roule principalement que pour lui-même, on l’a vu aux Jeux Olympiques.

Propos d’Eddy Merckx sur Het Nieuwsblad traduits par Cycling Weekly.

Même durant l’année 2022, Evenepoel avait connu des échecs, sur Tirreno-Adriatico ou le Tour de Suisse par exemple, qui résurgent toutes les critiques contre lui. Néanmoins, il ne s’est laissé pas abattre et a continué de travailler, jusqu’à remporter de grands succès en 2022. Désormais vainqueur d’un Monument (Liège-Bastogne-Liège) et d’un Grand Tour, Remco Evenepoel a fait taire les critiques les plus sévères à son égard et et tiré définitivement une page sur sa chute le 15 Août 2020.

La consécration d’un travailleur acharné.

Je ne connais personne de cet âge qui s’entraîne en altitude aussi souvent, qui s’entraîne autant, qui est aussi méticuleux, maniaque.

Patrick Lefevere, en parlant de l’éthique de travail de Remco,

Malgré ses 40 années d’expérience en tant que directeur sportif, Patrick Lefevere fait ce constat durant une interview avec Het Nieuwsblad.

Si Remco Evenepoel a surpris tout le monde en devenant le premier Belge depuis 1978 à avoir remporté un Grand Tour, c’est certes grâce à son talent mais également grâce à son éthique de travail impressionnante.

Pour devenir la phénomène qu’il a été durant ces trois semaines de compétition, le Brabançon a absolument tout fait pour être compétitif le jour J. Du 6 Mai au 19 août, début de la Vuelta, Remco a passé 44 jours en altitude, sur trois stages de préparation. Durant le premier stage, il a passé 14 jours dans une chambre hypoxique au sein de l’hôtel Syncrosfera, dans la région d’Alicante.

50 000 mètres de D+ en 19 jours pour Evenepoel à Livigno, ici avec Iljo Keisse / Strava de Remco Evenepoel

Durant le deuxième stage, qui a duré 19 jours à Livigno, il a totalisé 49 736 mètres de dénivelé positif. Une charge de travail impressionnante qui s’explique par l’ascension du Stelvio à trois reprises sur les deux versants (Bormio, Prato allo Stelvio), et celle du Mortirolo. Evenepoel n’hésite donc pas à s’entraîner dans des ascensions parmi les plus durs d’Europe dans le but d’atteindre ses rêves.

Pour son dernier stage en altitude, il a décidé de revenir sur l’hôtel Syncrosfera pour profiter de ses chambres hypoxiques, mais aussi dans le but de s’acclimater le plus possible à la chaleur, s’entraînant parfois sous des températures de plus de 35°C

Evenepoel, enfin, s’est affuté pour être au sommet de sa forme. Au Printemps, il pesait 64-64,5 kilos, selon son entraîneur Koen Pelgrim. Pour la Clasica San Sebastian et le Tour d’Espagne, il est descendu à 63 kilos, un poids qui lui permet à la fois de briller en haute montagne, et dans l’exercice chronométrée.

Surprenant dans la difficulté

Depuis le début de sa carrière, Remco Evenepoel avait la réputation d’être un coureur friable mentalement, craquant sous l’adversité. Cette analyse pouvait sembler vrai, notamment lorsque nous nous penchons sur l’étape reine du Tour de la Communauté Valencienne en début d’année.

Durant l’ascension finale, attaqué par Aleksandr Vlasov à moins de 2 kilomètres du sommet, le Belge craque et perd 41 secondes sur le Russe. Il semblait même lâcher son effort à un moment dans le dernier kilomètre de l’ascension. Cette fragilité mentale qu’il a affiché en Février n’est plus une réalité désormais.

Il est désormais capable de gérer les moments de faiblesse avec brio. Durant la 14ème étape du Tour d’Espagne, le maillot rouge se fait attaquer par Primož Roglič à 4 kilomètres de l’arrivée. Dans un mauvais jour, le Belge monte l’ascension à son rythme et ne perd que 48 secondes sans bonification sur le Slovène. S’il aurait tenté de suivre son dauphin au général, Evenepoel aurait explosé et perdu un temps bien plus conséquent. Le lendemain, dans la Sierra Nevada, il ne perd que 14 secondes sur Roglič, après l’avoir emmené dans les portions roulantes du col.

Bref, le champion belge du contre-la-montre, grâce à l’expérience acquise durant sa carrière, a désormais une gestion parfaite des moments difficiles, et c’est probablement cet aspect qui lui a permis de remporter la Vuelta à 22 ans.

Remco Evenepoel a souffert, mais a tenu bon dans la Sierra Nevada. / Belga

Sur le Tour de France dès 2023 ?

Avant le Tour d’Espagne 2022, Patrick Lefevere était intransigeant sur les débuts de Remco dans le Tour de France :

« L’an passé, nous avons commis l’erreur d’envoyer Remco au Tour d’Italie. C’était prématuré. Je ne veux plus me tromper de la sorte. C’est pourquoi nous avons décidé de ne pas encore l’inscrire au Tour de France cette année-ci (2023). »

Patrick Lefevere, sur le site internet du quotidien belge Le Libre en Juillet 2022.

L’idée de Patrick Lefevere était dans un premier temps partagé par Remco et son entourage. Mais la victoire « surprise » de ce dernier ce dimanche soir pourrait avancer les plans de la Quick-Step d’ici l’année prochaine. En effet, Evenepoel est favorable à participer au Tour dès 2023, si le parcours convient à ses qualités de rouleur :

« Si le parcours me convient l’année prochaine, je pourrais demander d’y participer. Cela dépend beaucoup du nombre de km de chrono. »

Remco Evenepoel, durant un entretien de 30 minutes avec le journaliste Maxim Goethals du quotidien belge Het Laatste Nieuws.

Si Remco participerait au prochain Tour de France, il affrontera probablement les deux meilleurs coureurs de Grand Tour de la planète : Jonas Vingegaard et Tadej Pogačar. Cela donnerait lieu à une bataille épique sur les Grands Tours, pour les années à venir.

Evenepoel, Pogačar et Vingegaard : une bataille dès le prochain Tour de France ? / @gettyimages

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